mardi 3 janvier 2012

Retour au temps du maître et de l'esclave récalcitrant ?



delize1
" Le Canard Enchaîné " (seul grand journal indépendant de France puisque ne vivant pas de la manne publicitaire des grands groupes industriels) nous donne sa version des faits concernant les conditions de l'arrestation de Gbagbo...
Lire les deux articles ci-dessous.
L'assaut contre Gbagbo en tenue camouflée
Quelle frustration ! Sarko, chef des armées, vient de gagner une guerre, et il doit tout faire pour éviter les lauriers. Même si cela ne trompe personne, de Juppé à l'état-major, chacun y est allé de son couplet faussement modeste : ce sont les troupes de Ouattara qui ont arrêté Gbagbo. Les Français - pardon, l'ONU, avec l'aide française - ont juste apporté leur soutien.
Dernièrement, Sarko avait demandé aux forces françaises d'intervenir militairement mais en évitant, autant que possible, de donner l'impression que c'étaient-elles qui permettaient à Ouattara de l'emporter. Et on en a vu les effets au cours de la conquête du sud du pays et de l'entrée dans la ville d'Abidjan.
En réalité, lors de l'assaut final contre la résidence du président déchu, toute la logistique (hélicos, blindés, troupes) était française. Nos forces spéciales étaient prêtes à investir le bunker, et toutes les opérations menées par les «forces républicaines » ou par l'ONU ainsi que les transmissions étaient gérées par Licorne. Le commandement a fait savoir à Gbagbo que, s'il ne se rendait pas aux troupes de Ouattara, il serait contraint de se rendre aux Français.
Une humiliation supplémentaire, paraît-il.
Depuis des jours, Sarko répétait qu'il était essentiel que Gbagbo soit pris vivant pour ménager les chances d'une réconciliation. Et qu'il fallait éviter à tout prix de se mettre en avant, ce qui aurait pour effet de transformer Ouattara en créature de l'Occident en général et de la Françafrique en particulier.
Les consignes ont été suivies. Mais la ficelle est tellement grosse que le tir de barrage sur le thème « C'est pas nous, c'est Ouattara » n'a été pris au sérieux par personne. Cette petite guerre de communication, elle, a été perdue...
Jérôme Canard
© Le Canard Enchaîné (13/4)
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Sarko, chef de guerre : agir d'abord, réfléchir ensuite
Qu’on se le  dise : ce ne sont pas les Français qui ont capturé Laurent Gbagbo, ce sont les Ivoiriens eux-mêmes ! Les apparences sont sauves, et pourtant on a du mal à pavoiser. Installé au pouvoir par des milices accessoirement coupables de quelques massacres, Alassane Ouattara devra prouver qu'il est un vrai président et pas seulement l'ami de Nicolas Sarkozy, dont il fut longtemps le voisin et l'administré à Neuilly-sur- Seine. Quant à notre chef suprême des armées, il devra prouver aux Africains qu'il est à la fois le gardien intransigeant de la démocratie et le grand copain des Bongo et autre Biya.

Même si son ego est dilaté comme jamais, Sarko l'Africain aurait tort de confondre Côte d'Ivoire et cote de popularité. Plus il envoie d'hélicos, plus il fait du rase-mottes dans les sondages ! Désespérant ! Aujourd’hui, la France est engagée dans 11 opérations extérieures, du Kosovo à l'Afghanistan en passant par le Tchad et le Liban. L'addition est salée. Comme le Longuet, ministre de la Défense, « si le conflit dure, nous serons obligés d'en tirer les leçons ». Combien de postes d'enseignants en moins ? Les caisses sont vides, mais les chargeurs sont pleins.

Et la victoire s'éloigne comme un mirage. Dans le désert libyen, il est aujourd'hui question, sous le couvert des résolutions élastiques de l'ONU, de lancer des troupes terrestres. Un « groupe de contact » international envisage froidement de négocier avec Kadhafi, par-dessus la tête des insurgés. A mesure que la coalition de l'Otan s'élargit, les chances de victoire militaire s'amenuisent. Que font nos Rafale ? Heureusement, la Bulgarie annonce qu'elle va envoyer des troupes. Avec des infirmières que Caria Bruni ira ensuite libérer ?

Ah ! la guerre, c'est décidément plus compliqué qu'un coup de fil de Bernard-Henri Lévy !

F. P.
© Le Canard Enchaîné (13/4)
Ndlr