dimanche 19 mai 2013

Burkina : Y a-t-il encore un pilote dans l’avion ?


Publié le jeudi 16 mai 2013
Nous entamons un trimestre de toutes les incertitudes. Mai, juin et juillet pourrait nous réserver des surprises. Qu’en sera-t-il de l’état de santé du président ? Que vont faire Roch et compagnie ? Toutes les options sont sur la table.
A la journée du paysan à Banfora, le 26 avril dernier, les burkinabè ont vu leur président dans un état physique qui ne les a pas du tout rassuré. Ce qui les a le plus frappé c’est ce cou effilé qui donnait l’impression de rompre sous le poids de cette tête qu’il n’arrivait plus visiblement à supporter. Cette image de leur président a beaucoup ému et peiné nombre de burkinabè. Il y a peu, pour ne pas dire pas du tout de communication, autour de la santé du président. Les burkinabè se bornent donc à observer ses apparitions publiques et à jauger son état physique qui,à vue d’œil, n’est plus celui du fringant capitaine du début de la décennie. Pourtant Blaise Compaoré, né en 1951, a fêté en février dernier ses 62 ans, l’âge auquel certains ailleurs, briguent la magistrature suprême. Sauf que notre président a derrière lui, près d’une trentaine d’années d’exercice à un haut niveau du pouvoir d’Etat. Les burkinabè qui n’ont pas le moyen de s’informer sur la santé du président sont donc réduits à faire des commentaires sur son état physique.
ça bruisse autour du président !
C’est vrai que le président et son entourage font un effort inouï pour prouver que le physique du président qui parait de plus en plus fatigué, ne l’empêche pas de s’acquitter de son devoir de président. Il continue d’accorder des audiences, de présider les conseils des ministres (même s’ils sont de plus en plus réduits), de voyager et de participer aux sommets avec ses pairs de la sous région. La dernière rencontre de cette nature a eu lieu à Yamoussoukro et n’a pas été annoncée par la TNB qui ne semble pas avoir été conviée. C’est notre confrère Lefaso.net qui a eu la primeur de l’info sous la plume du directeur de la communication de la présidence. Tout ça évidemment ne signifie pas grand-chose, sauf que c’est inhabituel.
Les efforts qui se déploient autour du président pour ne rien laisser paraître d’une éventuelle défaillance, n’empêchent pas les bruits de courir.
Le 25 avril au soir, le président en route pour Banfora, pour la journée du paysan passe la nuit à son pied à terre de Bobo Dioulasso. Vers 22 heures, c’est apparemment la panique. Le président « est tombé  » laissent entendre les coups de fil qui proviennent de la résidence. Est-ce une crise vagale ? Peut-être. Sauf qu’apparemment c’était pas la première fois que cela arrivait au président. A la foire agricole et pastorale de Yako aussi, en mi avril, après des efforts plus que de raison, pour quelqu’un qui revenait d’un check-up en France, seulement quelques jours auparavant, le président avait dit-on été pris d’un malaise semblable. De retour, le président a dû refaire le chemin retour en France, accompagné de son frère cadet, à bord de l’avion d’un opérateur économique ami. Certains plus rassurants disent que le président avait un rendez vous médical déjà prévu.
Comme Pompidou, en 1972 que les français regardaient se faire ronger par la maladie, les burkinabè semblent réduits au même spectacle. Il est difficile de continuer à soutenir qu’il n’y a rien à voir « circuler ». Les questions sont nombreuses et pressantes : De quoi souffre le président ? Est-ce invalidant à terme ? Est-ce que les rumeurs qui disent qu’il est condamné à court terme sont exactes ? La présidence n’aura d’autre choix que de parler. De respecter les burkinabè.
Autour du président tout se délite
Les confidences du président lui-même, montrent qu’il a conscience que tout se délite autour de lui. Il ne semble pourtant pas avoir fait le deuil de promouvoir son jeune frère dans les rangs de ses successeurs éventuels. Il semble pour l’heure dans une stratégie de colmatage. Il a relancé les contacts avec ses anciens inconditionnels. Le palais de Kosyam est donc le lieu actuellement, d’un vrai chassé croisé pour voir comment redresser le cours des choses. Le président aurait dit-on laissé entrevoir une idée d’un congrès extraordinaire « de reprise en main  » d’un CDP, qui aurait, comme certains propos l’on laissé entrevoir à la dernière réunion du BPN « de gros diables  » à exorciser. Ce à quoi aurait répondu le secrétaire général Assimi Kouanda : « le diable est dans la maison depuis longtemps. Ce n’est pas nous qui l’y avons fait entrer ».
Celui qui n’est pas quiet par cette tournure des choses c’est bien sûr François Compaoré. L’effervescence a donc gagné son camp et ses amis ont commencé à resserrer les rangs. 
Si le président fait des clins d’œil à ses anciens obligés, les propositions qu’il met sur la table ne semblent pas convaincre. Certains pensent que les propositions sont en deçà de la gravité de la situation du pays. La situation est nécrosée. L’entourage du président est dans une logique jusqu’au bouliste et ce n’est pas l’entêtement à consacrer Alizeta Gando (le CSC voudrait interdire de l’appeler ainsi désormais), comme président de la Chambre du commerce et d’industrie du Burkina qui va arranger les choses.
On réentend parler du parti de Roch 
Les réunions ont repris et plusieurs noms d’un probable futur parti politique des dissidents du CDP sont avancés. De nouveaux délais sont aussi annoncés ; probablement en juin prochain. Ce parti des dissidents devraient, comme on l’avait entendu en 2012 regrouper autour de Roch Marc Christian Kaboré, l’essentiel des membres des « conseillers » du CDP. A ce qu’on dit, les textes sont prêts. Même si ce n’est pas la première fois que pareille occurrence circule. Les services informent le président sur ces réunions qui se tiennent et qui sont sûrement infiltrées. En retour aussi quelques pare-feux sont allumés, pour semer le doute dans le camp des dissidents, comme cette rumeur insistante qui indique que Roch Marc Christian Kaboré a accepté un poste d’ambassadeur à Copenhague.
N’empêche, le président semble évaluer la gravité de la situation. Récemment, il a rencontré séparément Salif Diallo et Roch Marc Christian Kaboré. Il n’aurait pas fait des propositions révolutionnaires, mais au regard de la gravité de la situation, il pourrait abattre sa carte « joker ». Il s’agirait finalement de revenir aux propositions d’un certain Salif Diallo récemment réaffirmées par Juliette Bonkoungou dans son interview à notre confrère L’Observateur Paalga. Remettre tout à plat, engager l’ensemble des acteurs dans des discussions inclusives pour une vraie refondation de la démocratie et du régime.
Il devrait aussi et c’est le fait nouveau qui est rapporté : « organiser et annoncer au courant de l’année en cours sa sortie de scène  ». A ce niveau, le propos reste vague. D’aucuns disent que la proposition viendrait de lui et d’autres soutiennent que certaines personnes consultées le lui ont suggéré et comme d’habitude, il n’aurait pas répondu. Ou en tout cas, pas avec conviction.
Sauf que très peu de personnes croient vraiment à cette éventualité. Les Roch iront-ils jusqu’au divorce avec Blaise Compaoré ? Les rumeurs ont repris. En face, on suit tout ça de près. Pour bien les « mélanger » comme on dit prosaïquement chez nous, des ballons d’intox sont lâchés, comme cette nomination annoncée de Roch comme ambassadeur à Copenhague. Les amis du « gros » démentent fermement, soutenant qu’il a décliné toutes les propositions de nomination qu’on lui a faites depuis qu’il a quitté la présidence de l’assemblée nationale. Mais il en faut plus pour rassurer. Dans ce monde « d’opports », la confiance est la chose la moins bien partagée. 
Newton Ahmed BARRY

MALHEUR AUX VAINCUS IVOIRIENS. Un francais parle de la politique de la France.


JEAN-LUC MELENCHON : MALHEUR AUX VAINCUS IVOIRIENS

Photo: JEAN-LUC MELENCHON : MALHEUR AUX VAINCUS IVOIRIENS 

Le service après-vente des interventions militaires de nos présidents successifs est un devoir qui dépasse les temporalités médiatiques. Quand la guerre a lieu, l’armée transporte les journalistes et les installe dans des points d’observations choisie par elle. Pendant quelques jours les « reporters » filment librement ce qu’il est prévu de les voir filmer et commentent librement en direct « sur place, depuis le terrain » leurs collègues en plateau à Paris qui leur lisent les dépêches de l’armée et du gouvernement. Jusque-là tout va très bien. En effet il ne saurait être question de laisser de tels énergumènes pourrir une guerre avec leurs inévitables otages ou leurs morts mis en exergue chaque jour au journal de vingt heures. Surtout que sur ces plateaux tournent avec suavité deux ou trois experts directement liés à nos Etats-Majors, revue et colloques savants, qui commentent des cartes du meilleur effet. De cette façon tout se déroule, avec une magnifique précision d’horloge, selon le plan prévu. Premier temps on intervient au nom des droits de l’homme comme le prouvent des images « tournées en caméras cachées au péril de notre vie ». Deuxième temps on commente les droits de l’homme bafoués avant notre glorieuse présence vu qu’il n’y a plus rien à montrer en image car les zones de combat sont interdites d’accès. Troisième temps la guerre est finie, les droits de l’homme sont rétablis, la population sort les drapeaux français tous neufs qu’elle cousait en cachette depuis des semaines. Les télés rentrent à la maison, les commentaires s’interrompent car le sujet est vite épuisé (surtout dans le désert où il n’y a vraiment personne). Depuis peu il y a une nouvelle séquence imposée : la visite sur place du président très bon très grand qui vient écumer la joie du peuple libéré. « Merci la France » « Sarkozy ! Sarkozy ! » à Benghazi. « Merci papa Hollande » à Tombouctou. Les sceptiques reçoivent le coup de grâce. Quoi qu’il en soit, quatrième temps, la guerre continue. Peu importe qu’elle continue. Le cirque est parti, le spectacle a lieu ailleurs. Les droits de l’homme retournent donc au présentoir de la bonne conscience, entre la tête de buffle empaillé et le portrait du Dalaï Lama. A partir de cet instant on ne peut revenir sur la scène de ces exploits guerrier qu’avec un masque et des gants, car il s’agira de fouiller dans la charogne. 

En Côte d’ivoire, comme hier au Kosovo, comme à présent en Lybie et très bientôt, c’est certain, au Mali et en Syrie, nos chers alliés politiques « amis des droits de l’homme » que nous sommes venus secourir s’avèrent être « à la longue », c’est-à-dire hors de la quinzaine pendant laquelle les médias montrent quelque chose, d’odieux pourris et parfois même des criminels notoires. Voyez comment les prétendus « combattants de la liberté » du Kosovo trafiquaient les organes des prisonniers serbes qu’ils prélevaient pour les revendre. Motus. Le serbe était le méchant du film. Puis ils menacèrent de mort la présidente du Tribunal Pénal International. Silence : aucun d’entre eux ne sera donc jugé. En Lybie et en Syrie aujourd’hui les « insurgés » combattent un despote avec des méthodes aussi répugnantes que les siennes et parfois même pire. C’est ce que vient de montrer le recours aux armes chimiques par les « rebelles » en Syrie. Etrange : la femme qui le révèle pour l’ONU est celle qui a été menacée déjà pour le Kosovo. Encore elle ! Heureusement, les nord-américains sont là pour révéler qu’ils disposent de preuves solides montrant que le despote a usé de ces armes chimiques. Et patati et patata. La vie, quoi. Je ne crois pas surprendre beaucoup de mes lecteurs en écrivant tout cela. Je les invite pourtant à suivre avec attention ce qui leur est dit sur ces sujets quand ils en entendent parler. Car il nous faut tous tirer parti de chacun de ces épisodes. C’est nécessaire pour améliorer notre compréhension du monde et pour éduquer nos réflexes face à la machine de propagande quand elle se met en mouvement. Sinon comment assumer notre dignité de citoyens ? Nous devons exercer en esprit libre nos pouvoirs de discernement. Il est essentiel, là encore de prendre d’abord conscience du rôle d’illusionniste (souvent distrayants, j’en conviens) des médias officialistes. 

En Côte d’Ivoire, des criminels de toutes sortes, massacreurs de civils, tortureurs de prisonnier civils, bourreurs d’urnes patentés, occupent dorénavant les postes clefs du régime « ami des droits de l’homme » que Nicolas Sarkozy a installé au pouvoir. Un rapport de l’ONU, non commenté aux journaux de 20 heures français pourtant tellement actif dans le service de vente directe de la belle guerre de Cote d’ivoire note : « d'anciens commandants de zone ayant à leur actif un nombre notable de violations du droit international humanitaire ont rejoint les rangs ordinaires des Forces Républicaines de Côte d'Ivoire. Des individus comme Martin Kouakou Fofié (qui est sous le coup de sanctions de l'ONU depuis 2006), Ouattara Issiaka (alias ì Wattao), Hervé Touré (alias ì Vetcho ), Koné Zakaria et Chérif Ousmane ont tous été promus à des postes stratégiques de commandement. Ils ont également des contingents sous leurs ordres et d'importantes quantités d'armes (et de matériel connexe) entre leurs mains." Ces gens sont des impliqués dans des crimes dont le récit vous fait dresser les cheveux sur la tête. Qui cela va-t-il empêcher de dormir ici, au pays des droits de l’homme qui n’hésite pas à s’engager militairement pour défendre nos principes ? Personne ! Et surement pas François Hollande. Il a confirmé la marionnette présidentielle Alassane Ouatarra qui est venue lui faire acte d’allégeance à domicile. J’ai alors demandé si ce noble guerrier se souvenait de notre compatriote Michel Gbagbo détenu dans des conditions infra humaines par les vainqueurs qui l’ont d’abord copieusement tabassé. Michel Gbagbo est citoyen français. Il a été détenu sans jugement ni même inculpation pendant des mois. Puis il a été détenu dans des conditions qui l’ont amené aux portes de la mort. Il ne faisait pas de politique. J’ai interpellé le gouvernement. Personne ne m’a répondu. Il faut quand même dire, sans doute, que s’appeler Gbagbo et être le fils de son père, même si on n’a pas d’activité politique n’est pas bien malin. Fabius qui a eu ses petites entrées auprès de Laurent Gbagbo du temps où il était puissant devrait pouvoir s’en émouvoir. Non. Dans la mesure où l’ennemi est vaincu, les vainqueurs ont tous les droits. Notamment celui de martyriser les vaincus. Bien sur cela se fait en toute bonne conscience au nom des droits de l’homme qui ont été méprisé par les vaincus, cela va de soi. 

« Vae victis » dit l’adage des romains, malheur aux vaincus. Tout est alors permis contre eux. Je ne veux pas gâcher vos rêves avec des cauchemars venus de Côte d’Ivoire. Mais le sort réservé aux six cent soixante dix membres du Front Populaire Ivoirien détenus par les officiels actuels pourraient vous faire très peur. Passons sur celui réservé à madame Simone Gbagbo qui vient d’être enlevée de l’hôpital où il avait bien fallu la conduire. Battue en public sous les yeux des caméras par des soudards, elle est pourtant réclamée par le tribunal pénal international. Sa défense ne sait rien d’elle. Elle est vivante et martyrisée. Qui s’en soucie à Paris parmi ceux qui dînaient avec elle du temps où elle était la « première dame »? Moi, je n’ai jamais diné avec les Gbagbo du temps où ils étaient puissants. Ils ne m’ont ni reçu, ni invité. J’étais à la gauche du PS et de l’internationale socialiste. Mais je sentais le souffre pour eux. Ils recevaient Henri Emmanuelli, et d’autres beaucoup moins à gauche. Au bureau national du PS des gens comme le renégat Eric Besson réclamaient des sanctions contre les Gbagbo sans beaucoup de succès car nombreux étaient ceux qui regardaient la pointe de leurs chaussures. Ils ont fini par applaudir l’intervention militaire de Nicolas Sarkozy. Tous sont devenus muets depuis. Défendre leurs droits humains aujourd’hui ajoute aux croix qu’il me faut porter devant la meute. Mais pourtant je le fais. Quand je vois un « ministre de la justice et des droits de l’homme » refuser l’accès de tout avocat auprès de mon compatriote Michel Gbagbo, je me souviens que lui et son ministère ne seraient rien ni personne sans l’accord de François Hollande. Quand Simone Gbagbo est enlevée de son hôpital à la faveur d’une anesthésie générale et interdite de contact avec ses conseils, je suis juste soulevé de dégout par la lâcheté de ceux qui autorisent ces exactions à Paris. Et je ne voudrais pas que les ivoiriens croient que « c’est ça la France ». Et je ne voudrai pas qu’ils montrent mon pays du doigt. Exactement comme moi je ne crois pas que Alassane Ouatarra, ce soit la Côte d’Ivoire que je ne montre pas le pays du doigt a cause des bourreaux des milices nordistes. 

Il y a eu des élections municipales il y a trois semaines en Côte d’Ivoire. Evidemment, vu la situation, le Front Populaire Ivoirien et ses alliées ont appelé au boycott. Selon eux, la participation a été de 15%. Le président « élu », Alassane Ouatara dit qu’elle a été de… 30%. Pas de quoi pavoiser ! Mais selon les observateurs internationaux ce serait 20 %. Rien qui évoque la joie et la mobilisation d’un pays « libéré ». Cette très faible participation, due au boycott et à la lassitude générale de la population, montre au contraire un pays prostré et abusé. Et dans ce naufrage, le parti d’Alassane Ouattara a subi une sévère débâcle. A peine 20 % des nouveaux maires sont issus de ses rangs et ils viennent des régions déjà sous contrôle de ses milices partisanes sécessionniste sous l’ère légale de Laurent Gbagbo. La moitié des nouveaux maires sont des « indépendants ». 30% environ sont issu du très ancien parti présidentiel des lendemains de la décolonisation, le PDCI ! Sur le terrain de nombreux incidents ont eu lieu entre les deux partis. Là encore pas de trace du « pays libéré », juste une exaspération généralisée et une tension rappelant à tous les conditions politiques qui prévalaient à la veille de l’intervention militaire française. 

Monsieur Alassane Ouattara, Président de la République de Côte d’Ivoire, a officiellement invité François Hollande à se rendre dans son pays. Peut-être qu’il ira. Je ne sais pas. Mais je sais qu’il est temps pour notre pays d’exiger la libération sans condition de notre compatriote Michel Gbagbo. Juste parce que c’est notre compatriote et que nous ne devons pas accepter que son nom soit un motif de persécution. C’est pourquoi je prends le temps d’écrire ces lignes pour rappeler que le retour à un état de droit qui avait été promis passe nécessairement par le respect des droits attachés à la personne de tous les prisonniers politiques ! Et enfin j’affirme que le renvoi devant les tribunaux des personnes proches de Monsieur Ouattara suspectées d’avoir commis de graves crimes contre l’humanité en Côte d’Ivoire est une urgence centrale dans un contexte où nos armes sont intervenue sous le prétexte de la restauration des droits de l’homme. Je sais très bien que ce n’était pas vraiment le sujet. Mais ce pourrait être une opportunité. Même après coup. 

Je ne veux pas finir ce chapitre sans revenir aux questions de couverture médiatique de nos guerres. Tout le monde ne se contente pas d’occuper avec sérieux son rôle de marionnette. Quelques courageux vont pourtant plus loin, sans la laisse ni la gamelle fournie par le service de communication des armées en campagne. Mais le temps qu’ils arrivent là où les choses se passent, le temps qu’ils recoupent leurs informations, bref le temps qu’ils fassent le travail de journaliste, la guerre officielle est finie. Ils n’accèdent donc plus à l’antenne. Ou alors seulement pour le magazine spécialisé qui diffusent leur travail entre deux reportages voyeuristes sur la prostitution aux iles Boudijis et le trafic des escargots en voie de disparition en république centre Afroucha. Ceux-là se font tuer aussi parfois. Leur mort, n’est pas filmée. Mais elle sert de prétexte à d’émouvantes auto-célébrations de la corporation par des hommes et des femmes troncs qui ne quittent jamais leurs studios bien chauffés. Leurs images, leurs lignes sont tout ce qu’il nous reste de la part de vérité qu’ils ont pu capter. Mais comme ce sont des parts de vérité, il faut pour en disposer aller les chercher soi-même. Mais peut-être est-ce un devoir à leur égard aussi.

http://www.panafricain.com/?page=detail_article&art=78466&lang=fr&pi=11
Le service après-vente des interventions militaires de nos présidents successifs est un devoir qui dépasse les temporalités médiatiques. Quand la guerre a lieu, l’armée transporte les journalistes et les installe dans des points d’observations choisie par elle. Pendant quelques jours les « reporters » filment librement ce qu’il est prévu de les voir filmer et commentent librement en direct « sur place, depuis le terrain » leurs collègues en plateau à Paris qui leur lisent les dépêches de l’armée et du gouvernement. Jusque-là tout va très bien. En effet il ne saurait être question de laisser de tels énergumènes pourrir une guerre avec leurs inévitables otages ou leurs morts mis en exergue chaque jour au journal de vingt heures. Surtout que sur ces plateaux tournent avec suavité deux ou trois experts directement liés à nos Etats-Majors, revue et colloques savants, qui commentent des cartes du meilleur effet. De cette façon tout se déroule, avec une magnifique précision d’horloge, selon le plan prévu. Premier temps on intervient au nom des droits de l’homme comme le prouvent des images « tournées en caméras cachées au péril de notre vie ». Deuxième temps on commente les droits de l’homme bafoués avant notre glorieuse présence vu qu’il n’y a plus rien à montrer en image car les zones de combat sont interdites d’accès. Troisième temps la guerre est finie, les droits de l’homme sont rétablis, la population sort les drapeaux français tous neufs qu’elle cousait en cachette depuis des semaines. Les télés rentrent à la maison, les commentaires s’interrompent car le sujet est vite épuisé (surtout dans le désert où il n’y a vraiment personne). Depuis peu il y a une nouvelle séquence imposée : la visite sur place du président très bon très grand qui vient écumer la joie du peuple libéré. « Merci la France » « Sarkozy ! Sarkozy ! » à Benghazi. « Merci papa Hollande » à Tombouctou. Les sceptiques reçoivent le coup de grâce. Quoi qu’il en soit, quatrième temps, la guerre continue. Peu importe qu’elle continue. Le cirque est parti, le spectacle a lieu ailleurs. Les droits de l’homme retournent donc au présentoir de la bonne conscience, entre la tête de buffle empaillé et le portrait du Dalaï Lama. A partir de cet instant on ne peut revenir sur la scène de ces exploits guerrier qu’avec un masque et des gants, car il s’agira de fouiller dans la charogne.

En Côte d’ivoire, comme hier au Kosovo, comme à présent en Lybie et très bientôt, c’est certain, au Mali et en Syrie, nos chers alliés politiques « amis des droits de l’homme » que nous sommes venus secourir s’avèrent être « à la longue », c’est-à-dire hors de la quinzaine pendant laquelle les médias montrent quelque chose, d’odieux pourris et parfois même des criminels notoires. Voyez comment les prétendus « combattants de la liberté » du Kosovo trafiquaient les organes des prisonniers serbes qu’ils prélevaient pour les revendre. Motus. Le serbe était le méchant du film. Puis ils menacèrent de mort la présidente du Tribunal Pénal International. Silence : aucun d’entre eux ne sera donc jugé. En Lybie et en Syrie aujourd’hui les « insurgés » combattent un despote avec des méthodes aussi répugnantes que les siennes et parfois même pire. C’est ce que vient de montrer le recours aux armes chimiques par les « rebelles » en Syrie. Etrange : la femme qui le révèle pour l’ONU est celle qui a été menacée déjà pour le Kosovo. Encore elle ! Heureusement, les nord-américains sont là pour révéler qu’ils disposent de preuves solides montrant que le despote a usé de ces armes chimiques. Et patati et patata. La vie, quoi. Je ne crois pas surprendre beaucoup de mes lecteurs en écrivant tout cela. Je les invite pourtant à suivre avec attention ce qui leur est dit sur ces sujets quand ils en entendent parler. Car il nous faut tous tirer parti de chacun de ces épisodes. C’est nécessaire pour améliorer notre compréhension du monde et pour éduquer nos réflexes face à la machine de propagande quand elle se met en mouvement. Sinon comment assumer notre dignité de citoyens ? Nous devons exercer en esprit libre nos pouvoirs de discernement. Il est essentiel, là encore de prendre d’abord conscience du rôle d’illusionniste (souvent distrayants, j’en conviens) des médias officialistes.

En Côte d’Ivoire, des criminels de toutes sortes, massacreurs de civils, tortureurs de prisonnier civils, bourreurs d’urnes patentés, occupent dorénavant les postes clefs du régime « ami des droits de l’homme » que Nicolas Sarkozy a installé au pouvoir. Un rapport de l’ONU, non commenté aux journaux de 20 heures français pourtant tellement actif dans le service de vente directe de la belle guerre de Cote d’ivoire note : « d'anciens commandants de zone ayant à leur actif un nombre notable de violations du droit international humanitaire ont rejoint les rangs ordinaires des Forces Républicaines de Côte d'Ivoire. Des individus comme Martin Kouakou Fofié (qui est sous le coup de sanctions de l'ONU depuis 2006), Ouattara Issiaka (alias ì Wattao), Hervé Touré (alias ì Vetcho ), Koné Zakaria et Chérif Ousmane ont tous été promus à des postes stratégiques de commandement. Ils ont également des contingents sous leurs ordres et d'importantes quantités d'armes (et de matériel connexe) entre leurs mains." Ces gens sont des impliqués dans des crimes dont le récit vous fait dresser les cheveux sur la tête. Qui cela va-t-il empêcher de dormir ici, au pays des droits de l’homme qui n’hésite pas à s’engager militairement pour défendre nos principes ? Personne ! Et surement pas François Hollande. Il a confirmé la marionnette présidentielle Alassane Ouatarra qui est venue lui faire acte d’allégeance à domicile. J’ai alors demandé si ce noble guerrier se souvenait de notre compatriote Michel Gbagbo détenu dans des conditions infra humaines par les vainqueurs qui l’ont d’abord copieusement tabassé. Michel Gbagbo est citoyen français. Il a été détenu sans jugement ni même inculpation pendant des mois. Puis il a été détenu dans des conditions qui l’ont amené aux portes de la mort. Il ne faisait pas de politique. J’ai interpellé le gouvernement. Personne ne m’a répondu. Il faut quand même dire, sans doute, que s’appeler Gbagbo et être le fils de son père, même si on n’a pas d’activité politique n’est pas bien malin. Fabius qui a eu ses petites entrées auprès de Laurent Gbagbo du temps où il était puissant devrait pouvoir s’en émouvoir. Non. Dans la mesure où l’ennemi est vaincu, les vainqueurs ont tous les droits. Notamment celui de martyriser les vaincus. Bien sur cela se fait en toute bonne conscience au nom des droits de l’homme qui ont été méprisé par les vaincus, cela va de soi.

« Vae victis » dit l’adage des romains, malheur aux vaincus. Tout est alors permis contre eux. Je ne veux pas gâcher vos rêves avec des cauchemars venus de Côte d’Ivoire. Mais le sort réservé aux six cent soixante dix membres du Front Populaire Ivoirien détenus par les officiels actuels pourraient vous faire très peur. Passons sur celui réservé à madame Simone Gbagbo qui vient d’être enlevée de l’hôpital où il avait bien fallu la conduire. Battue en public sous les yeux des caméras par des soudards, elle est pourtant réclamée par le tribunal pénal international. Sa défense ne sait rien d’elle. Elle est vivante et martyrisée. Qui s’en soucie à Paris parmi ceux qui dînaient avec elle du temps où elle était la « première dame »? Moi, je n’ai jamais diné avec les Gbagbo du temps où ils étaient puissants. Ils ne m’ont ni reçu, ni invité. J’étais à la gauche du PS et de l’internationale socialiste. Mais je sentais le souffre pour eux. Ils recevaient Henri Emmanuelli, et d’autres beaucoup moins à gauche. Au bureau national du PS des gens comme le renégat Eric Besson réclamaient des sanctions contre les Gbagbo sans beaucoup de succès car nombreux étaient ceux qui regardaient la pointe de leurs chaussures. Ils ont fini par applaudir l’intervention militaire de Nicolas Sarkozy. Tous sont devenus muets depuis. Défendre leurs droits humains aujourd’hui ajoute aux croix qu’il me faut porter devant la meute. Mais pourtant je le fais. Quand je vois un « ministre de la justice et des droits de l’homme » refuser l’accès de tout avocat auprès de mon compatriote Michel Gbagbo, je me souviens que lui et son ministère ne seraient rien ni personne sans l’accord de François Hollande. Quand Simone Gbagbo est enlevée de son hôpital à la faveur d’une anesthésie générale et interdite de contact avec ses conseils, je suis juste soulevé de dégout par la lâcheté de ceux qui autorisent ces exactions à Paris. Et je ne voudrais pas que les ivoiriens croient que « c’est ça la France ». Et je ne voudrai pas qu’ils montrent mon pays du doigt. Exactement comme moi je ne crois pas que Alassane Ouatarra, ce soit la Côte d’Ivoire que je ne montre pas le pays du doigt a cause des bourreaux des milices nordistes.

Il y a eu des élections municipales il y a trois semaines en Côte d’Ivoire. Evidemment, vu la situation, le Front Populaire Ivoirien et ses alliées ont appelé au boycott. Selon eux, la participation a été de 15%. Le président « élu », Alassane Ouatara dit qu’elle a été de… 30%. Pas de quoi pavoiser ! Mais selon les observateurs internationaux ce serait 20 %. Rien qui évoque la joie et la mobilisation d’un pays « libéré ». Cette très faible participation, due au boycott et à la lassitude générale de la population, montre au contraire un pays prostré et abusé. Et dans ce naufrage, le parti d’Alassane Ouattara a subi une sévère débâcle. A peine 20 % des nouveaux maires sont issus de ses rangs et ils viennent des régions déjà sous contrôle de ses milices partisanes sécessionniste sous l’ère légale de Laurent Gbagbo. La moitié des nouveaux maires sont des « indépendants ». 30% environ sont issu du très ancien parti présidentiel des lendemains de la décolonisation, le PDCI ! Sur le terrain de nombreux incidents ont eu lieu entre les deux partis. Là encore pas de trace du « pays libéré », juste une exaspération généralisée et une tension rappelant à tous les conditions politiques qui prévalaient à la veille de l’intervention militaire française.

Monsieur Alassane Ouattara, Président de la République de Côte d’Ivoire, a officiellement invité François Hollande à se rendre dans son pays. Peut-être qu’il ira. Je ne sais pas. Mais je sais qu’il est temps pour notre pays d’exiger la libération sans condition de notre compatriote Michel Gbagbo. Juste parce que c’est notre compatriote et que nous ne devons pas accepter que son nom soit un motif de persécution. C’est pourquoi je prends le temps d’écrire ces lignes pour rappeler que le retour à un état de droit qui avait été promis passe nécessairement par le respect des droits attachés à la personne de tous les prisonniers politiques ! Et enfin j’affirme que le renvoi devant les tribunaux des personnes proches de Monsieur Ouattara suspectées d’avoir commis de graves crimes contre l’humanité en Côte d’Ivoire est une urgence centrale dans un contexte où nos armes sont intervenue sous le prétexte de la restauration des droits de l’homme. Je sais très bien que ce n’était pas vraiment le sujet. Mais ce pourrait être une opportunité. Même après coup.

Je ne veux pas finir ce chapitre sans revenir aux questions de couverture médiatique de nos guerres. Tout le monde ne se contente pas d’occuper avec sérieux son rôle de marionnette. Quelques courageux vont pourtant plus loin, sans la laisse ni la gamelle fournie par le service de communication des armées en campagne. Mais le temps qu’ils arrivent là où les choses se passent, le temps qu’ils recoupent leurs informations, bref le temps qu’ils fassent le travail de journaliste, la guerre officielle est finie. Ils n’accèdent donc plus à l’antenne. Ou alors seulement pour le magazine spécialisé qui diffusent leur travail entre deux reportages voyeuristes sur la prostitution aux iles Boudijis et le trafic des escargots en voie de disparition en république centre Afroucha. Ceux-là se font tuer aussi parfois. Leur mort, n’est pas filmée. Mais elle sert de prétexte à d’émouvantes auto-célébrations de la corporation par des hommes et des femmes troncs qui ne quittent jamais leurs studios bien chauffés. Leurs images, leurs lignes sont tout ce qu’il nous reste de la part de vérité qu’ils ont pu capter. Mais comme ce sont des parts de vérité, il faut pour en disposer aller les chercher soi-même. Mais peut-être est-ce un devoir à leur égard aussi.

http://www.panafricain.com/?page=detail_article&art=78466&lang=fr&pi=11